Chirac-Villepin, un couple uni malgré les couacs et les attaques

Publié le par rezeid

"Je pense que la stratégie Villepin/Chirac pour 2007 est déjà en préparation, il ne faut pas rêver il se batterons jusqu'au bout." Rezeid

En dépit des rumeurs de mésentente lancées par les sarkozystes, ou de désaccord dans le domaine international, la candidature du Premier ministre pour 2007 sera défendue, assure-t-on à l'Elysée.

Depuis quelques semaines, ministres et députés sarkozystes ont enfilé leurs gros sabots pour répéter à qui veut l'entendre : il y aurait de la friture sur la ligne Matignon-Elysée, voire des «dissensions» au sein du couple exécutif. Dernier exemple en date : le chef de l'Etat n'a pas apprécié que son Premier ministre délaisse autant le dossier du Clemenceau, qui lui est revenu en boomerang dans la figure. Le contrat première embauche (CPE) susciterait également des inquiétudes à l'Elysée, où Jacques Chirac surveille attentivement le pouls de la jeunesse.

En fait, selon les amis du ministre de l'Intérieur, le Président vivrait «mal psychologiquement» l'ascension de son chef de gouvernement. Villepin se comporterait comme «un parvenu» qui ne mettrait plus suffisamment les formes avec son aîné en empiétant sur ses prérogatives ou en décidant sur certains dossiers sans le consulter. Une première offensive très coordonnée avait eu lieu à La Baule, début septembre, lors de l'université d'été de l'UMP. Les fidèles du patron de l'UMP y allaient de leurs «confidences» sur la guerre à venir Chirac-Villepin.

En janvier, un Conseil des ministres a relancé ces bruits. Dominique de Villepin a ostensiblement attendu que Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy aient fini un bruyant aparté pour commencer à parler. Signe, selon les sarkozystes, que l'ambiance ne serait pas au beau fixe entre le Président et son Premier ministre. Un autre témoin, chiraquien celui-là, a vu la scène d'un autre oeil : «C'était ironique, on sent qu'il y a énormément d'affection entre ces deux-là.» «Cette manière de vouloir enfoncer un coin est grossière. Ça va aller crescendo au fil des mois. Nous savons à qui nous avons à faire», tranche un des proches collaborateurs du Président.

Nuances. Car pour l'Elysée, il n'y en a qu'un, et c'est Villepin. L'actuel locataire de Matignon est, dans l'esprit des collaborateurs du Président, le dauphin désigné. Il suffisait, pour s'en convaincre, d'entendre le chef de l'Etat lui tresser des lauriers en recevant, le 1er février, les parlementaires de l'UMP à l'Elysée (Libération du 2 février). A l'Elysée comme à Matignon, on écarte donc toute tension. Avec des nuances. Villepin, plus soucieux de son avenir qu'il veut bien le dire, s'applique à montrer qu'il a une liberté quasi totale. «Lorsque les dossiers sont prêts, on les présente à l'Elysée», explique un de ses proches. Villepin a le chef de l'Etat au moins une fois par jour au téléphone («C'est monté un jour jusqu'à 17 coups de fil», confie un conseiller du Président). Le secrétaire général de l'Elysée, Frédéric Salat-Baroux, a également des contacts quotidiens avec le Premier ministre, son directeur de cabinet, Pierre Mongin, et son plus proche conseiller, Bruno Le Maire. Sur les dossiers techniques et complexes, comme le contrat première embauche, les conseillers de l'Elysée sont sollicités. Mais il s'agit juste «d'apprécier l'équilibre final», estime-t-on à Matignon. Le message est clair : le CNE comme le CPE sont les «bébés» du Premier ministre. L'Elysée jure apprécier cette large autonomie qui tranche avec l'époque Raffarin. «Chacun à sa place est totalement investi dans sa fonction telle que définie par la Constitution, assure un collaborateur du Président. Dominique sait exactement quelle est sa feuille de route. Et tout autant que nous, il veut des résultats. Pour le moment, il nous tire dans les sondages, ce qui n'était pas le cas de son prédécesseur lors de ses six derniers mois à Matignon.»

Louanges. Bichonné par Claude Chirac et les collaborateurs de l'Elysée, où il a occupé sept ans le poste de secrétaire général, Villepin ne reçoit pour l'heure que des brassées de fleurs de ses anciens amis. «Dominique est trop intelligent pour commettre une faute de goût susceptible de vexer le Président», assure l'un. «Villepin est un intime de la pensée du Président, résume un autre. Il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de vigne entre eux.» Si rien n'est planifié, chacun au Château s'apprête le moment venu à soutenir une candidature Villepin. Avec une théorie à l'appui : «Il n'y a pas de malédiction des Premiers ministres pour accéder à l'Elysée. Chirac, Balladur et Jospin étaient en situation de cohabitation. Or cette fois, nous avons un Président qui ne se représente pas mais passe le relais à son chef de gouvernement, cela change tout», assure un chiraquien.

Comme à l'époque Balladur-Mitterrand, c'est du domaine international que les nuages pourraient venir. Très sourcilleux de ses prérogatives, le chef de l'Etat entend incarner seul la voix de la France à l'étranger. En septembre à New York, toute l'équipe diplomatique de l'Elysée avait accompagné Villepin, qui remplaçait le Président convalescent, à l'assemblée générale de l'ONU. Prévenant, il s'était contenté de remettre dans ses mots les discours de l'Elysée et avait systématiquement expliqué qu'il parlait «au nom du président de la République». Depuis, il est très discret, sortant rarement hors de France. Ce qui ne l'empêche pas de jouer parfois sa propre musique. En déplacement à Salzbourg (Autriche), il est allé plus loin que Chirac dans son analyse de l'échec du référendum sur la Constitution européenne en regrettant l'élargissement hâtif de l'UE. «Comme toujours, son discours nous avait été soumis. Ni l'un, ni l'autre n'est monolithique. Heureusement, ils ne pensent pas toujours pareil ! Mais au final, c'est toujours le Président qui prime et arbitre dans le domaine international», explique un proche de Chirac.

Selon plusieurs sources, il y aurait cependant eu de réelles frictions entre l'Elysée et Matignon sur la Côte-d'Ivoire. Dominique de Villepin, qui a négocié les accords de Marcoussis entre les belligérants ivoiriens lorsqu'il était au Quai d'Orsay, aurait ainsi gardé un canal officieux avec Laurent Gbagbo, dont Chirac ne veut plus entendre parler. «Ah, le mythe du canal Gbagbo à Matignon», soupire un diplomate qui préfère souligner que «Dominique de Villepin a conservé ­ à titre personnel ­ de l'intérêt pour les affaires africaines». Voilà qui sonne comme une mise en garde. A titre personnel.

source: www.liberation.fr

Publié dans dominiquedevillepin

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